MaMi Deli x noemiche
La boulangerie MaMi Deli vous fait voyager et saliver ! Sur les étals, une véritable déclaration d'amour pour la boulangerie : babka, halla, mouna, borekas, manouchés, bagels pour le midi… Vous vous promenez au shuk HaCarmel, le plus grand marché extérieur de Tel Aviv puis aussitôt vous êtes transportés dans les rues du Pletzl (“petite place” en yiddish, la “place Saint-Paul”). MaMi Deli est un lieu fascinant où cohabitent deux cultures, ashkénazes et sépharades (leurs tensions sont en voie de disparition). Ici, c’est la paix des ménages ! J’écoute avec soin l’équipe de MaMi Deli qui m’explique l’origine de ces recettes si douces au palais. Sur la gauche, en rentrant, des photos - souvenirs (épices, pain au zaatar, halla, samboussek…) pour rappeler qu’ici vous trouverez le meilleur des spécialités juives. Un peu plus loin, des étagères qui mettent en lumière la gastronomie juive : livres de cuisine, halva (pâte de sésame sucrée), tehina (crème de sésame), zaatar, sumac, café, eau de fleur d’oranger… Si vous aussi, vous pensez que la cuisine est un fait culturel majeur alors vous êtes au bon endroit ! Je rencontre Jérémie - associé à Keren - qui rêvait d’ouvrir une boulangerie et de produire son propre pain et Jeanne Champeau, directrice de MaMi Deli.
MaMi Deli to go
Jérémie et Keren ont ouvert le restaurant Levantine il y a un 1 an et demi, au bout de la rue. C’est une cantine pro-orientale, israélienne et végétarienne. On retrouve des recettes familiales, c’est convivial, très bon et le houmous, un des meilleurs de Paris. Il manquait un peu de street food israélienne, le fameux to go : le petit boreka, le petit pain zaatar… et de culture juive - point commun qui rapproche les deux fondateurs. “Moi je suis ashkénaze et Keren, séfarade. Donc MaMi Deli c’est un mix entre la boulangerie israélienne mais aussi le deli new yorkais, un mix de ces 2 univers : cheesecake, betzel pastrami, bagel saumon… On fait aussi des créations comme le cookie à la halva et évidemment le pain de Shabbat, la halla, c’est la recette de la famille de Keren, de sa mère précisément, traditionnelle, il n’y a ni beurre ni lait. Et on a augmenté la gamme avec quelques pains plus traditionnels.”
MaMi Deli est un commerce de quartier, les clients curieux côtoient des clients plus fidèles qui viennent sur une base quotidienne pour leur pain, leur sandwich du midi ou pour les fêtes juives. “Le produit emblématique de la boutique c’est la babka, c’est à la base une brioche d’Europe de l’Est, issue de la culture juive ashkénaze russe d’Europe et aujourd’hui, les juifs russe l’ont apporté en Israël avec eux, aujourd'hui là-bas, c’est l’équivalent du Savane pour nous, c’est dans tous les supermarchés, c’est vraiment cette brioche qui synthétise l’idée de MaMi Deli”.
Un lieu populaire
Historiquement, on réutilise les restes de la pâte à halla pour faire un dessert parvé (= sans lait) et au moment des diaspora des populations ashkénaze, notamment aux États-Unis où cette population a pu s’enrichir en investissant dans les matières premières. On s’est mis à enrichir ce genre de produit avec du beurre, c’était aussi avec un relâchement de la tradition et de la religion. Des produits laitiers ont été ajoutés et elle est dégustée hors du Shabbat. Elle est devenue plus riche et moins traditionnelle. La babka est devenue populaire !
“Un lieu populaire, c’est ce qu’on a essayé de retrouver en proposant une babka salée qu’on a lancé il y a quelques mois, on réutilise la pâte à halla pour faire une babka salée avec un pesto maison, des tomates séchées et des pignons de pain. On a également tenté des choses plus audacieuses : le Eytan, par exemple, est une vraie création à base de halloumi et de zaatar. Vous ne trouverez ce pain nulle part ailleurs.” Keren et Jérémie ne sont pas boulangers mais avant de lancer leur boutique, ils ont fait des stages en boulangerie et un stage chez un meunier à la fois pour apprendre les processus mais aussi faire leurs propres recettes. Il fallait expliquer la recette de la halla, les boulangers ont finalement autant appris qu’eux. “On est parti chez le meunier avec la mère de Keren, c’était une vraie aventure. Keren n’est pas boulangère mais elle a tout le savoir-faire, elle a beaucoup appris en cuisine. Et après on a formé des cuisiniers qui travaillaient avec nous chez Levantine au pain. Aujourd’hui, ils font les meilleurs hallot de Paris. On est assez fiers.”
Une cuisine kosher friendly, homemade et accessible
“Tout est fait maison avec nos petites mains, on est resté authentique (la babka n’est pas francisée, on reste sur le produit simple, originel, authentique, c’est la même babka qu’à Moscou et à Tel Aviv), c’est ça qu’on recherche. Un côté artisanal, ce n’est pas une usine. On souhaite incarner une valeur d’ouverture en étant kosher friendly (on est ouvert tous les jours) pour justement faire découvrir la gastronomie juive à tout le monde, en parler, faire goûter des choses, des saveurs. Le houmous connu des français et aujourd’hui popularisé, on veut que ce soit pareil avec la halla ou la halva. Utiliser la tehina dans le salé mais aussi dans le sucré. Proposer une babka salée. C’est assez important. Les gens viennent pour de la halla hors Shabbat, pour le goûter, parce qu’il aime ça.”
Jérémie a une fille qui a 2 ans et une autre de 3 mois. Éduquer au bon goût c’est faire découvrir, démocratiser la cuisine faite maison, familiale et pas trop chère. Chez MaMi Deli, vous pouvez bien manger pour 8 - 10 €. “Il faut faire découvrir la gastronomie au grand public, on a un e-shop aussi ! Proposer des services traiteur, pour les concerts, start-up, cocktail de mairie, tournages... Bien manger dans le cadre professionnel. Pour les tournages, par exemple, tu as 20 minutes pour manger et nous on trouve ça important de donner quelque chose qui se mange sur le pouce, rapidement mais que tu peux manger sur 1 semaine de tournage sans te lasser. Une offre très flexible, on répond au budget, aux besoins, aux formats d’événement, on veut juste faire plaisir aux gens quoi.”
“Comme d’autres boutiques consœurs, qu’on aime et qu’on admire : Florence Kahn, Sacha Finkelsztajn - la boutique jaune, NANI, ou les plus récentes Babka Zana, Babka Paris, Salatim - Maafim , MaMi Deli c’est le pouvoir de transmettre et de faire découvrir la culture juive à travers sa cuisine.” (Keren)
Faire confiance aux consommateurs
“Le pain de demain c’est plein de choses qu’on fait déjà, à commencer par un pain qui est bon pour toi, au levain, travaillé. Un pain bon pour toi et bon pour la planète. Nos farines viennent d’un moulin français avec un label rouge (super qualité) et certaines sont biologiques. Le pain de demain c’est un pain qui te fait du bien, avec des bons produits, sains. Un pain fait maison. Il y a un tournant facilement identifiable dans les grandes villes, Paris, Lyon, Marseille… qui revalorisent le levain, l’acte de pétrir. Il y a des comptes Instagram super chouettes sur des traditions et des savoir-faire. On va bientôt savoir ce que c’est le pain de demain !”
“La question de la saisonnalité est très intéressante aussi, très actuelle mais plus facile pour certaines gastronomies qu’avec d’autres. On n'est clairement pas radical sur ce sujet. On va dans ce sens-là sans en faire notre fer de lance. Cette ambition est portée par d’autres établissements dont c’est vraiment la raison d’être, c’est vrai que le but c’est d’être sensibilisé à la question, de l’intégrer à l’offre mais on préfère que ce ne soit pas le sous-titre de MaMi Deli. Quand tu fais des bons produits tu n’as pas besoin de le dire, tu peux pas tout marketer tout le temps mais tu peux faire confiance aux consommateurs pour qu’il le sache. Nos pains sont au levain, on le dit parfois mais on le répète pas non plus à longueur de journée. Le consommateur fera vite la différence au goût. Le client est roi, il est plus que le roi, il est juge. Même si tu fais 0 communication, si c’est bon ça finira par marcher, ils vont en parler. Le plus important c’est le produit, la qualité, une fois que tu as ça tu peux travailler sur le reste.”
Montrer ce qu’on sait faire
C’est bien d’être une boulangerie instagrammable ? “Moi je trouve ça bien de communiquer, pour être dans l’ère du temps, c’est très bien honnêtement puis c’est sympathique, c’est plein de bienveillance, les gens réagissent, ils goûtent ton travail, ils passent en boutique, il y a un esprit de communauté. Mais nous on est pas dans le too much, on est pas influenceurs, on est là pour montrer ce qu’on sait faire, on essaie de faire des belles choses au lieu des photos à l’arrache, ça met plus en valeur ce qu’on fait mais c’est juste ça, on répond aux inbox, aux questions, c’est plus direct. C’est encore très parisien. À Limoges, tu peux avoir une très bonne boulangerie, les gens n'auront pas forcément besoin d’Instagram pour le savoir. Le revers de la médaille, c’est les gens qui ne consomment plus que par Instagram, ils viennent au restaurant, prennent des photos pendant une demie heure au lieu de manger, c’est moins ma cam. Il y a un juste milieu : communiquer, prendre des belles photos, c’est un bon exercice pour communiquer sur ce qu’on fait, partager les nouveautés - ouverture - fermeture. Sans pour autant en faire 15 tonnes, 10000 stories / jour.”
“Notre fil directeur c’est que notre présence sur les réseaux sociaux doit être le prolongement de notre positionnement en boutique, ça doit nous servir à parler de produits que les gens ne connaissent pas forcément, faire savoir aux gens dont la culture et qui pourraient trouver leur madeleine de Proust en boutique, que on est là. Ça doit rester cohérent avec ce qu’on est en boutique : une entreprise familiale, nos photos sont prises nous-mêmes, on retouche tout nous-même. On se fait démarcher toutes les 2 semaines par des agences pour gérer nos réseaux sociaux mais ce n'est pas une bonne idée, comment tu vas faire pour avoir le ton que j’adopte quand je parle à mes clients ? Tu n’es pas moi. Ce n’est pas un truc qu’on délaisse mais n’en faisons pas trop, il faut que les futurs clients consomment ça tranquille et surtout qu’ils viennent manger. Il y a des gens qui vont liker des photos et qui ne sont jamais venus manger, c’est bizarre. Viens goûter et lâche Instagram !”
La boulangerie de ton quartier ❤️
Et si vous deviez recommander une boulangerie ? (Jérémie) “La boulangerie de ton quartier, la petite boulangerie, pas forcément très connue, tu sais qu’il y a des bons produits, un bon sandwich à 3 - 4 € le midi, ton pain au chocolat. Tous les matins moi je prends mon pain au chocolat dans ma boulangerie et je pense qu’ils ont pas de compte IG, ça c’est mon truc. J’irais plus vers des boulangeries qui ont été primées. En bas de chez moi, j’ai une boulangerie, qui a gagné le prix du meilleur pain au chocolat de Paris, honnêtement, il est excellent, 1,10€. C’est parfait.”
(Jeanne) “La boulangerie Sain parce que c’était ma boulangerie de quartier aussi. C’est un pain que je trouve bon, travaillé. C’est vrai que je suis plutôt une itinérante des boulangeries, j’ai mon pain quotidien, je trouve tout ce dont j’aurais envie en matière de pain. J’aime justement le week-end me ballader, m’arrêter dans une boulangerie, goûter un produit que nous on a pas forcément ici ou quand je voyage j’aime beaucoup visiter les boulangeries, à la fois parce que c’est super inspirant parce que c’est enrichissant.”
“Keren et Jeanne sont de vraies foodies, elles aiment voir les dernières boulangeries, leurs créations. Elles s’inspirent. Je suis plus routinier. La boulangerie Utopie c’est vraiment très bon aussi. Et Mamiche, en matière de communication, elles sont très fortes les meufs, elles transmettent leur état d’esprit, elles s’amusent bien. Ça marche bien.”