Je rêvais de rencontrer Sara, la fondatrice de Maison Gazelle ! Sa pâtisserie me touche particulièrement car elle inspire encore de merveilleux souvenirs à mon père qui a vécu au Maroc. Une madeleine de Proust qu'il partage avec mes frères et moi depuis toujours. (Fun fact: Il a commandé 2 kilos de cornes de gazelle pour sa sœur, elles ont voyagé jusqu’à Singapour !)
Sara est franco-marocaine : elle aime le monde de la gastronomie française, ses coulisses et la richesse et la diversité d’une culture berbère toujours vivante. La pâtisserie au Maroc fait partie de son artisanat, son histoire et son identité. La corne de gazelle, très prisée, est tout simplement inoubliable.
On peut faire des kilomètres pour déguster une très bonne corne de gazelle mais par pitié appelez-la “cheville de gazelle” comme les marocains car à cet endroit se niche aussi la séduction… (La cuisine du Maroc, Fatéma Hal)
Fidèle à la tradition marocaine d’hospitalité et de générosité légendaire, Sara m’accueille avec sa collection de cornes de gazelle et un lait d’amande à la fleur d’oranger. Le goût subtil de la Kaab el ghazal et la douceur du lait d’amande livrent une saveur exceptionnelle.
Maroc et France, terres brûlantes et sensuelles
Petite, sans le savoir, Sara est passionnée d’amande ; elle boit des litres de sirop d’orgeat, adore la galette des rois et les financiers et plus que tout au monde les cornes de gazelle. À 12 ans, c’est la révélation, elle apprend enfin qu’il s’agit de l’amande, ce fruit de l'amandier, enfermé dans une coque à écale de couleur verte, de parure oblongue, de saveur douce ou amère. “Je ne sais pas d’où ça vient, ma mère devait probablement manger des kilos d’amandes lorsqu’elle était enceinte de moi !” Sara m’explique que le mot “gazelle” a son importance - “le Ghazal est un terme arabe qui signifie “conversation avec une femme” - “ce mot a quelque chose de singulier et de très féminin ; et il y a une autre réalité : "le mâle de la gazelle s’appelle aussi la gazelle, cette égalité me plaît et le mot “maison” est un mot franco-français compris de tous dans le monde comme étant une référence française.”
L'exigence et l'excellence sont les moteurs de Sara qui fut longtemps l'oreille attentive des chefs à travers le monde. Elle a débuté à Bordeaux, sa ville natale avec de belles productions de caviar d’Aquitaine puis à Rungis : la truffe blanche d’Italie, la truffe noire du Périgord, les volailles de Brest… Elle rencontre des producteurs d'exception, goûte, touche, hume, sélectionne et vit le produit dans sa totalité “Le terroir français est renommé mondialement et je suis super fière de tout ce travail d’éducation vis-à-vis de nos terres. Mais pourquoi au Maroc, malgré le climat et l’abondance de produits bruts, n’y a-t-il pas cette mise en avant du terroir ?”
Des produits bruts ultra sourcés
Lier un sourcing de qualité, pour faire vivre une démarche paysanne avec des produits du terroir, voilà ce qui donne à sa vocation un véritable relief. Sara a un déclic : rendre hommage à ses origines, sa famille et à tous ces amoureux du goût rencontrés au sein de ses voyages. La corne de gazelle est la pâtisserie iconique marocaine et sa pâtisserie préférée, plus raffinée et moins sucrée que les autres. Elle se lance avec sa tante Fatema, garante du savoir-faire ; la corne de gazelle n’est qu’un début, me dit-elle. Maison Gazelle grandit : elle collabore avec Frichti, livre toute la France et l’Europe et travaille avec certains hôtels et restaurants, 700 pièces sont produites par jour.
“Travailler avec des produits bruts ultra sourcés et de saison, c’est essentiel. Je suis intimement convaincue que si on a de bons produits et qu’on ne déroge pas à cette règle, on n’a pas besoin de tricher avec trop de matière grasse ou trop de sucre, le produit s’exprime. C’est le fil conducteur de mon projet. Parfois, on a quelques clients qui sont un peu déçus parce qu’on est en rupture de stock sur certaines recettes mais on préfère être limité et ne pas déroger aux critères organoleptiques que d’être en flux tendu et délaisser la qualité.”
Choukran les petits producteurs
“J’espère dans les années à venir un schéma vertueux avec le moins d’intermédiaires possibles - des techniques d’agriculture durables qui offrent aux consommateurs des produits meilleurs au goût et pour la santé. Je pense que les producteurs c’est-à-dire ceux qui font tout, ceux qui sont au plus près des produits bruts seront vraiment les stars ; ce sont eux qui font le plus gros travail de la chaîne de valeur et la qualité de la pâtisserie finie. J’imagine que la mise en valeur du producteur sera hyper forte et puissante, qu’on aura plus de transparence et moins d’ingrédients à ajouter. Peut-être que les chefs-pâtissiers créeront des gâteaux avec 4 à 5 ingrédients maximum, très purs avec des produits d’exception, sans arôme, sans colorant, sans émulsifiant et additif. Un dessert sain mais pas moins gourmand. Ceci est vraiment possible à condition qu’on choisisse de bons produits.”
Il faut pouvoir respecter les cycles naturels (souvent longs) pour faire correctement les choses (Élie, co-fondateur de Miyam)
“Dans l’époque dans laquelle on vit, un challenge se dresse : entre ce qu’on souhaiterait faire et nos modes de consommation et nos envies d’instantanéité et de yolo. Il y a des choix à faire dans la food comme accepter de ne pas manger des produits qui ne sont pas de saison toute l’année sous prétexte qu’on en a envie. Essayons d’aller aux plus près des artisans en permanence, au marché plutôt qu’au supermarché. La nature dicte ce que l’on mange, soyons au plus près du produit là où il naît et se transforme, que ce soit l’arbre, la terre ou l’artisan.”
La gourmandise prise par les cornes
Par ici, pour encore plus de gourmandise. Toutes les pâtisseries chez Maison Gazelle se nourrissent des mille et un parfums du Maroc : le miel, la fleur d’oranger, la cannelle, les amandes et les dattes. Une gamme complète de créations gourmandes et légères portées par des ingrédients exceptionnels, à commencer par un trio d'amandes marocaines émondées chaque jour dans la boutique parisienne : Les amandes Roussi du Moyen-Atlas, les Riffi venues de la région de Nador, et enfin les amandes Bledi, pépites gustatives de la région du Haut-Atlas ; le tout corsé par son eau de fleur d'oranger pure distillée à la main entre Fès et Casablanca. Cette eau florale concentrée à la saveur puissante ajoute une note subtile d’agrume au lait d’amande fait-maison et pressé à froid. Filez chez Maison Gazelle et comme on dit, kiffez !
Sara réinvente la recette traditionnelle de la corne gazelle en lui portant un regard nouveau. Rose, citron et cardamome, amandes et sésames torréfiées, cacao et bergamote ou noisettes du Piémont : selon l'humeur, on vient s'approvisionner en assortiments de cornes de gazelles toutes plus succulentes les unes que les autres. Du miel coule dans vos veines et si vous préférez les pâtisseries mielleuses et voluptueuses : Goûtez la chebakia (pâtisserie gourmande et fondante, parfumée des plus belles épices marocaines), les briouates (ces fines feuilles de pâtes à pastilla cachent en leurs cœurs une pâte d'amande fondante au miel), l’amlou (la pièce maîtresse des petits-déjeuners berbères) ou les baghrir (icône du goûter marocain, cette crêpe à mille trous est à la fois aérienne et gourmande). تذوق جيد.
Goûte katkout*
*poussin en arabe littéraire
Je ne suis pas une gourou du goût (quoique) ni une mamamouchie de la food mais la collection salée de cornes de gazelle a l’air folle (papa écoute ça) : une corne de gazelle au tajine d’agneau pruneaux, une autre légèrement sucrée à la tfaya - une sauce marocaine à base d’oignons et de raisins secs - à la cannelle et au comté et une autre kefta et piment d’espelette. “L’idée c’est de vraiment s’amuser avec tout cet art de vivre franco-marocain, le champ des possibles est juste énorme. On a cette chance, Paris célèbre les noces de la culture française et maghrébine, leurs histoires se croisent de part le flux des peuples à travers les siècles.”
“J'ai eu la chance de pouvoir faire goûter mes créations à des personnes issues de pays et de cultures différentes (chinoise, japonaise, saoudienne, anglaise, russe), c’est intéressant d’avoir leurs opinions. Les Japonais trouvent par exemple que les cornes de gazelle ressemblent à des gyozas et généralement le premier effet de séduction, c’est la façon qu’on a de présenter nos cornes de gazelle, que ce soit ici chez Maison Gazelle, au sein du salon de thé avec les arts de la table ou lors d’un pop up avec nos packaging, elle interroge et saute aux yeux. La dégustation est un passage obligé pour connaître, rien qu’en une bouchée, l’histoire de cette rencontre entre le raffinement marocain, le sourcing des meilleurs produits et l’élégance française.”
Merveilles sucrées sur un plateau d’argent
[…]
tu te rappelles
toi l'enfant née d'une gazelle
le rêve balbutiait en nous
son chant éphémère
le vent et l'automne dans une petite solitude
je te disais
laisse tes pieds nus sur la terre mouillée
une rue blanche
et un arbre
seront ma mémoire
donne tes yeux à l'horizon qui chante
[…]
Quel oiseau ivre, Tahar Ben Jelloun
J’avais prévenu Sara que je ne pouvais pas garder ce secret pour moi : si vous souhaitez réaliser vos propres cornes de gazelle, achetez des amandes méditerranéennes, inondées de soleil - espagnoles ou marocaines que vous émondez, séchez et réduisez en poudre, vous-même. Vous décuplez ainsi l’intensité de l’amande dans la corne de gazelle. Choisissez une eau pure de fleur d'oranger et non un arôme de fleur d’oranger qui contient de l’alcool et là vous ne pourrez pas vous tromper. Un vrai câlin gustatif. (Maman, on fait la Masterclass ?)
J’irai bien y goûter
Super ta newsletter, elle donne envie d’y faire un tour et de tout goûter…
Ma mie